Manquons-nous de temps ?

Les individus des societes developpees occidentales manquent-ils objectivement et subjectivement de plus en plus de temps? (Schor, 1991; Meda et Schor, 1997) Si ces propos ont suscite, a l’epoque, le debat aux Etats-Unis (les statistiques mobilisees par Juliet Schor avaient notamment ete mises en cause par Robinson et Godbey, 1999), specialistes des enquetes emploi du temps aux Etats-Unis), il n’en a pas ete de meme en France, le poids du chomage releguant legitimement ce genre de preoccupation aux derniers rangs. Depuis quelques annees pourtant, sous l’effet de la reprise de l’emploi intervenue entre 1997 et 2000, de l’augmentation du temps de travail de certaines categories et de la diffusion de la RTT, les enquetes commencent a s’interesser a ces questions et a dessiner les contours d’une population pour laquelle le manque de temps constitue un veritable probleme. Loin de n’etre qu’un petit inconfort personnel, qui serait l’apanage des cadres dirigeants et des wonderwomen, le sentiment de manque de temps apparait au contraire comme le signe d’un grippage ou d’une inefficacite des mecanismes classiques de regulation, et sans doute comme une invitation a concevoir des politiques publiques capables d’aider a la mise en place d’une nouvelle concordance et d’une plus grande coherence des differents temps individuels et sociaux.